Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
19 septembre 2015 6 19 /09 /septembre /2015 14:26

         A chaque bout du téléphone, à l’écoute, un être marqué par la douleur. Chacun d’eux sait que la douleur ne se partage pas, malgré tout ce qu’on en dit, qu’il faut longtemps pour qu’elle s’atténue et que le chagrin ressenti par les autres, même s’il est preuve d’amitié et de proximité, même s’il est plein d’attention et de chaleur, apporte sa dolence au poids de la douleur sans l’alléger. Nous le savions l’un et l’autre. Nous savions que de la solitude on peut tirer quelque chose – la volonté de se reconstruire, la faculté de lui donner une forme malléable mais intéressante et tonique. Nous savions que l’absence, elle, est terrible et inusable. Paradoxalement dressée comme un bloc monolithique au milieu du territoire des sentiments, elle symbolise une volonté mauvaise d’entêtement borné, elle est indéplaçable, encombrante, elle refuse de se faire oublier et on se cogne à elle sans cesse, au prix de meurtrissures et de bleus – incroyable puisqu’elle représente ce qui n’est plus, mais elle en a pris la place avec une volonté de faire mal à laquelle on ne se trompe pas, du fond d’une solitude où l’on tente de se reconstruire  sur des ruines. Oui, nous savions tout cela l’un et l’autre, et nous en avons discuté à voix retenue,  chacun disant sa peine sans penser qu’il allégeait celle de l’autre mais écoutant l’autre la dire, et au bout du compte comme disait mon cher Marivaux, il est né une douceur certaine de  cet échange où de part et d’autre se maîtrisaient les larmes.

Partager cet article
Repost0

commentaires

S
Vous citez votre "cher Marivaux", je cite ma chère L.D. et son Clair de Nuit qui atténue toujours mon chagrin: « […] sa solitude et la mienne se dissolvent dans une douceur commune où chacun se situe entier mais appuyé fraternellement à l’autre » (CN, p. 123).
Répondre
F
mais la langue élève tout, même cela
Répondre
D
Oui... Et c'est l'avis d'un sage et d'un orfèvre...Merci de cet échange si tonique.
F
quelle force de langue comme toujours sur des choses essentielles pour nous tous, mais quelld capacité aussi à garder distance et affirmer ainsi que c'est la langue qu'on questionne - oui, Marivaux est légitime ici
Répondre
D
Tous ces jugements chaleureux sur le fond et la forme... A garder près du coeur pour les moments de tristesse et de doute... nombreux, et qu'il est malaisé de bâillonner...

Présentation

  • : Le blog de lucette desvignes
  • Contact

Recherche

Liens