l'AGONIE D'N ROMAN
Les conseils essentiels répétés aux enfants de bonne éducation autrefois consistaient à ne pas se faire remarquer: silence, mutisme, calme - de quoi se faire oublier pendant le temps d'épreuve. Je ne sais pas ce que de nos jours on a retenu de ce code, mais je sais que pour ce qui concerne un livre le mieux serait pour lui qu'on en parlât. Et en bien, naturellement, mais au moins beaucoup, histoire que se trouvent confrontés les avis et opinions des uns et des autres.. Ma Laure à l 'Oeuvre souffre de cette espère de mise à l'écart; on en parle entre amis, entre initiés, entre fans, sans chercher à gagner d'autres adeptes et cela me navre. La littérature n'est plus guère à l'honneur en ces temps sanitaires et d'économie, et la diffusion de la mienne en outre ne facilite rien : je n'ai plus un seul des repères solides et points d'ancrage fidèles sur lesquels je pouvais compter il y a vingt ou trente ans (mais qu'est-ce que cette fantaisie aussi de continuer à publier quand on frise les cent ans?). Tout est changé, publics, libraires, habitués...Mon nom qui disait quelque chose au temps des deux sagas est à peu près lettre morte, même depuis L"Histoire de Colombe."."David, la nuit tombe"- la pièce n'est pas de moi, mais je voudrais m'emparer de ce beau titre pour évoquer le crépuscule des livres, celui qui leur est réservé ou qui émane d'eux pour atténuer leur rayonnement jusqu'à l'extinction des reflets.