PERDRE LA TETE
Au fond, je ne sais pas si boucher les trous en mettant des dates possibles mais en l'espèce complètement frauduleuses peut être qualifié de procédé honnête. Du moins ne vous caché-je rien : j'annonce une semaine de manquements, je vous offre un court moment de honte vite passé, je colmate les brèches, je feins de tout mettre en place comme si j'avais rempli mon devoir au quotidien... mais c'est de la frime, comme on dirait dans Balzac, c'est du mensonge puisque les dates devraient s'égrener et qu'elles vous sont fournies en bloc. J'espère que personne de vous, mes belins ou mes belines, ne s'offusquera de cette irrégularité, ou ne s'imaginera que je perds la tête. Cela me fâcherait, savez-vous. Il est vrai que si je perdais la tête, je ne me rendrais probablement pas compte que tout mon mécanisme mental est détruit et qu'il faudrait décréter Halte! C'est cela qui me trouble, mes agneaux : quand j'aurai commencé le grand déglingage, alors qu'il faudrait précisément dire Stop! ce qui me manquera sera la possibilité de le dire. L'horreur, donc, de se légumifier sans recours ni possibilité de réaction. Mais l'horreur absolue, finalement, si on se trouvait bien dans cette déréliction...
