En même temps que les archéologues découvraient que la civilisation des oasis était opulente, d’après la richesse des objets d’or massif travaillés en vases ou aiguières de toute beauté et d’après leur nombre et leur raffinement à être déposés auprès des défunts dans leurs tombeaux, en même temps ils constataient qu’il n’y avait aucune arme pour accompagner le dernier voyage des morts. Pas le moindre poignard ou stylet, pas de lance, pas de bouclier : cette civilisation ne cherchait ni à se défendre ni à attaquer, ce qui est tout de même rare, surtout que la preuve était manifeste qu’il y avait des contacts avec d’autres peuples grâce aux échanges de bijoux ou d’objets de toilette. Alors une population qui ignorait la guerre ? la crainte de la guerre ? la nécessité de se protéger ? On voudrait leur donner des médailles à tous ces gens paisibles qui ne pensaient pas qu’il fallait préparer la guerre pour assurer la paix… A côté de cela, autour d’Angkor et des cités à temples oubliés croulant sous la végétation exubérante, quelle tristesse de voir que les Cambodgiens eux-mêmes, en tout cas une infime minorité, se laissent dans leur misère circonvenir par les trafiquants d’antiquités et viennent avec des pics et des ciseaux détacher maladroitement des morceaux de temples – des sourires de Bouddhas, des sculptures, des frises – pour les vendre à des prix dérisoires. … C’est un ravage ignoble, fait dans la précipitation et qui abîme toute une façade, toutefois les autorités ont du mal à réagir. Le peuple est très conscient de cette destruction de son patrimoine, mais voir les vieillards et les écoliers pleurer les mêmes larmes n’est pas un remède, même si c’est une prise de conscience indignée et militante.