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11 janvier 2010 1 11 /01 /janvier /2010 10:52

Jugements  esthétiques

 

            Je méditais hier – pourquoi donc ne pas vous en faire profiter aujourd’hui ? jamais trop tard pour bien faire – sur la manière dont se forgent, se transportent et s’incrustent les jugements esthétiques. Ceux par exemple sur les films. J’ai été formée dans ma jeunesse à  l’école d’un Ciné-club rigoureux, et si j’ai des lacunes c’est bien dans le cinéma contemporain, où je suis incapable de me démultiplier pour pouvoir suivre dans tous les azimuts et sur tous les continents. Mais je déplore que, sous prétexte qu’un film ait été boutiqué dans les années héroïques, entre 30 et 36 surtout, on doive automatiquement le considérer comme un chef-d’œuvre. Quand on a dit film-culte, on peut tirer l’échelle, plus personne ne peut glisser une pâle et faible objection : si vous ne suivez pas aveuglément c’est que vous ne comprenez rien à rien. Je m’insurge naturellement là contre. J’ai besoin de garder mon indépendance de jugement, et en particulier sur des navets comme cette affreuse « Silvia Scarlet » qu’on veut nous faire passer pour une perle rare à découvrir sans faute. Je l’ai vue deux fois, histoire, honnêtement, de bien revenir sur mes préjugés de la première vision ; mais, aussi honnêtement, je n’ai pu envisager une troisième vision. On peut toujours prendre la défense de Cukor en mettant au premier plan ses problèmes personnels d’identité sexuelle : ça ne fera jamais cacher le grotesque absolu de cette malheureuse Katharine Hepburn déguisée en homme, avec ses pantalons trop larges et – pire que tout ! – son nasillement traînard et haut perché qui vous perce les oreilles. Si vous la flanquez d’un Cary Grant qui n’en est encore qu’au stade clown-acrobate (il ne sait pas encore qu’il peut devenir bouleversant dans « None but the Lonely Heart ») et qui gouaille vulgairement avec des clins d’yeux malsonnants (oui ! malsonnants !), vous obtenez un des plus désolants navets de toute l’histoire du cinéma. De grâce, qu’on l’exhibe comme navet, afin de montrer ce qu’il ne faut pas faire aux réalisateurs qui cherchent encore leur voie. Mais qu’on réserve bien les termes incitatifs consacrés par la tradition aux films qui en valent la peine, ou au moins dans lesquels on peut trouver un petit quelque chose. Ici, nada nada nada. Mes chats se sont, comme moi, détournés avec accablement. A demain.

                                                                                            Lucette DESVIGNES.

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