Par lucette desvignes
Beaucoup de films, surtout américains, traitent des conditions d’entraînement des soldats qu’on va envoyer au casse-pipe lorsqu’ils seront fin prêts. Ils apparaissent, quand on veut bien y réfléchir, comme une répétition de ce que sera leur destinée une fois sur les lieux de la bataille : les obscurs, les sans grade, malgré l’héroïsme qui leur vient une fois plongés dans l’action, se font décimer voire anéantir sous les coups de l’ennemi, tandis que les commandants responsables des massacres où ils les ont envoyés s’en tirent non seulement sains et saufs mais encore avec les honneurs. Pendant l’entraînement en effet, les simples soldats sont livrés sans protection à la brutalité haineuse des sergents, lesquels se vantent dès le début d’être haïs par leurs victimes jusque dans leurs souvenirs. On comprend que les marines, pour en arriver à leur état de perfection comme machines (capables d’endurer toutes les souffrances, de survivre dans les pires circonstances, de triompher dans tout combat à la loyale ou non) soient soumis à la brutalité terrible de leurs entraîneurs. Or les films dénoncent surtout la haine avec laquelle les formateurs s’acharnent sur les boucs émissaires qu’ils se sont choisis : soit les plus faibles, physiquement ou mentalement, soit au contraire les plus forts, ceux qui résistent, ceux qui ne cèdent jamais, ceux qui méprisent ce recours de brutes à la persécution – et qui, souvent, finiront tout de même au bout d’un long calvaire comme s’ils avaient été l’ennemi à abattre. Tant qu’il y aura des hommes, au titre d’ailleurs évasif, dénonce cet acharnement de brutes sur les meilleurs éléments de l’armée d’une manière un peu romanesque, voire romantique, passible de vieillissement, alors que d’autres films postérieurs, de plus en plus vindicatifs dans le style de Full Metal Jacket, en donneront de révoltantes illustrations.
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