Par lucette desvignes
CREATION
Vous savez sans doute que déjà souventes fois (peut-être même trop souventes fois pour certains) j'ai vitupéré contre les blessures, meurtrissures, lésions, viols et violations de toute sorte qu'on faisait, en ce siècle obsédé par le sexe, subir à la langue et à la grammaire françaises. Je ne saurais en effet digérer cette aberrante extension du féminin à toute fonction masculine dont par ce fait même on croit supprimer la traditionnelle spécificité de l'homme et, donc, du même coup, assurer la supériorité de la femme (or quand on disait "ma professeur" autrefois on passait pour venir de quitter ses vaches). Qu'on dise "la juge," "la notaire", "la substitut", cela passe déjà difficilement. Dès qu'on en arrive à "docteure", "professeure", "pasteure", "auteure" ça coince définitivement (et on n'améliore pas les choses en inventant "autrice", ce dernier raffinement ridicule). Je m'arrête ici, je pourrais continuer jusqu'au petit jour. Mais je voudrais aujourd'hui attirer votre attention sur le déglingage sans remède des méninges des rédacteurs de ces formules administratives dont on peut avoir besoin chaque jour : ils viennent de forger un mot dément, à la fois par le sens et par le mode de fabrication, qu'un ami vient de trouver sur une demande de subvention : il devait cocher une de trois cases "homme", "femme" ou "nongenré". On ne dira plus que les gratte-papier de l'administration sont payés à ne rien faire : ils créent, voyez-vous, ils créent.
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