Par lucette desvignes
Par l’arrangement des occasions, il s’est trouvé qu’il y a quelques mois j’ai découvert les enquêtes du Commissaire Nicolas Le Floch. J’en ai lu avec plaisir deux ou trois volumes : je trouvais fort astucieux qu’on eût situé ces enquêtes administratives (déjà audacieusement appuyées sur l’autopsie pratiquée en secret ainsi que sur un raisonnement approfondi des circonstances du crime) en plein dix-huitième siècle, en tâchant de conserver la tension qui a cours dans le cadre des investigations de notre temps même si le contexte s’y prêtait beaucoup moins par définition. Car le cadre par ailleurs apportait sa richesse historique, contact avec les grands de ce monde qui avaient laissé leur nom et leur trace dans le destin de la France, affaires en apparence crapuleuses où l’arrière-plan politique finissait par dominer… : la reconstitution d’un monde disparu a toujours été un élément supplémentaire d’intérêt dans le déroulement d’une histoire, surtout une histoire criminelle. Et j’admirais en outre l’astuce du romancier pour se choisir un créneau inépuisable, puisque après Louis XV et Sartine il y avait Louis XVI et Vergennes, puis la Révolution, puis le Directoire, puis l’Empire : à partir d’un schéma dramatique éprouvé, il n’y avait nulle raison de s’arrêter tant que le Commissaire Le Floch était en vie et en pleine activité. J’ai épuisé en trois histoires l’intérêt que me réservaient ces récits : point trop n’en faut et l’abondance en la matière risque de s’appeler surabondance et de lasser. Le passage à la télé en série nationale au décor brillamment reconstitué n’a pas servi l’entreprise. Les deux épisodes que j’ai vus (l’un d’eux hier soir, et pas jusqu’au bout tant je m’ennuyais) ont mis en lumière tous les défauts qu’on passait au roman : style ampoulé faussement d’époque articulé avec préciosité, dilution de l’intrigue par le saucissonnage voulu d’épisodes graveleux, pléthore d’engagements à l’épée souvent interminables à l’écran… Bref, fini pour moi le secteur Le Floch, à l’image comme en noir sur blanc. Mais naturellement, mes belins-belines, ce que j’en dis…
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