Il n’échappe à personne – je veux dire, personne qui me connaisse, qui me lise, qui m’écoute : croyez-moi, ça fait déjà du monde – que j’adore les bêtes, toutes les bêtes de la création, déplorant avec Werther que le moindre pas dans l’herbe supprime des vies d’insectes, respectant araignées, abeilles, guêpes et fourmis (ces dernières, dans la mesure du possible : il faut parfois se constituer en légitime défense, comme les policiers de notre actualité). Bref ma vie en symbiose avec mes onze chats recueillis pourrait servir de critère pour l’accession au bonheur. Pour autant j’ai toujours blâmé le comportement de certaines mémères à chienchien qui habituent leur toutou à prendre un chocolat avec des brioches à quatre heures (je n’invente pas : je cite). C’est cette petite fenêtre-là, ouverte sur le ridicule parmi les amis des bêtes (dont je suis passionnément) que je voudrais aujourd’hui entrebâiller pour vous. C’est à l’occasion de Noël (et l’on sait si pour les animaux ça veut dire quelque chose, Noël). Les nonosses d’un catalogue spécialisé se mettent à faire HO HO HO sous la dent, pour bien rappeler que ce cadeau leur a été offert par Saint Nicolas (ou Santa Claus, ou Father Christmas, ou Mos Craçun, ou Babbo Natale selon les latitudes), tandis qu’une variété de bonnets rouges et verts permettent à chaque toutou de trouver ce qui convient à son genre de beauté. Les petits manteaux avec trous pour les pattes, la queue et la laisse sont également décorés de sapins et d’étoiles, sans cela les toutous seraient tout tristes de ne pouvoir s’intégrer. Je ne galège pas : à l’article « tenue de Noël pour chat » (facile à enfiler, pas nécessaire que minet se tienne debout, la tenue du Chat Botté en vert et rouge se passe par la tête et le bonnet à pompon se colle sur l’occiput gaillardement) il est précisé qu’il faut l’habiller ainsi « pour qu’il soit parfaitement intégré » Voilà un truc pour supprimer nos problèmes de société et d’assimilation identitaire auquel personne n’avait encore pensé. Est-ce trop tard ?