Il y a des fois où M. Macron décide d'apparaître comme révolutionnaire. C'est tout du flan, bien entendu : M. Macron est davantage fait pour les amitiés condescendantes avec Stéphane Bern, rencontré dans les grands raouts mondains du XVIème ou les réceptions des grands de la Phynance, que pour l'évocation émue des grandes heures de 89. Il s'est choisi une révolution qui ne lui coûte rien à endosser, et dont l'analyse finement faite et refaite met en lumière tout ce qu'elle a causé comme dégâts, dans les mentalités, dans les institutions, en même temps que la libération en multiples domaines a entraîné un dérèglement d'ordre général : celle de 68, celle des pavés de mai, celle des émeutes du Quartier latin dont l'esprit a infusé jusqu'au plus petit lycée de campagne. En toute honnêteté, j'ai du mal à l'envisager en soixante-huitard, M. Macron, car même en rétrospective totalement imaginaire, on ne peut se le figurer que pérorant (dur et sec) depuis un balcon de mairie ou de préfecture, haranguant les foules étudiantes avec leurs banderoles et leur poing levé et les incitant à s'emparer des places fortes tout en lui en réservant la gloire. Grincements de dents, à cette suggestion, de tous les honnêtes gens qui constituent ses piliers ! Célébrer un mouvement honni, une catastrophe nationale, une ruine de l'économie? Et la trouille des dirigeants du pays, alors, faut-il la célébrer aussi, avant que la marche des honnêtes gens (des millions qu'ils étaient, pour la première fois dans la rue, autorisés par cet hapax à défiler comme les manifestants habituels, les feignants, les cyniques, les riens) ne leur redonne un peu confiance?. J'attends de pied ferme (et avec un petit sourire en coin) que cette célébration de 68 soit effectuée, et sous quelle forme. D'ici au 22 mars, il y a du temps à laisser passer.
