UNE FAUSSE MAITRISE DES INSTRUMENTS
J'ai passionnément aimé conduire, et je conduisais vite et bien, de l'avis du plus sévère et du plus compétent des critiques, celui qui a passé sa vie à mes côtés. Pour autant je ne savais absolument rien de ce qui fonctionnait sous le capot, et cela ne m'a jamais gênée. J'avais donc pensé qu'avec mon ordi je serais confrontée à un fonctionnement de même farine, et ce fut une grosse erreur, je dirais même une erreur grossière. Le bon entraînement de mes doigts et de mes neurones n'a jamais vraiment su dominer la fausse docilité du clavier et ses redoutables susceptibilités, et je suis la première à déplorer (oui, cela m'humilie, je n'ai pas de fausse honte à reconnaître cette infirmité) qu'à chaque instant une bourde ou une autre due à l'étourderie, au manque de sang-froid, à une mauvaise vision, à la raideur ou à la lourdeur dans les articulations digitales, ne gâche fâcheusement la qualité de mes résultats informatiques. Je reste avide de progrès, attentive à mémoriser toute espèce de petit truc qui pourrait améliorer mes performances. Ainsi je viens d'apprendre - trop tard pour hier - que quand j'effectue le vendredi les livraisons de Laure à l'Œuvre en prédécoupages pour votre lecture du week-end, il suffit que je n'incluse pas dans mon opération Surbrillance le petit (à suivre) qui délimite bravement les territoires à imprimer pour que se déversent irrépressiblement, non seulement les trois pages programmées, ce qui est l'effet recherché, mais encore deux, voire trois rations hebdomadaires, ce qui contrarie dommageablement le déroulement de l'opération du roman en feuilleton. C'est incroyable comme peu de chose peut dégénérer en panique consternée : du moins saurai-je dorénavant maîtriser la distribution des provendes littéraires - si ça rate, alors je vous donnerai le droit de me signifier qu'il est temps, grand temps, que je rejoigne mes ancêtres.