BILAN D'UN VIEUX MACHIN
"J'ai un' jambe qui va pas, Et l'autre qui n'va guère..."Si, passé les soixante printemps, on commence à s'éplucher dès le matin, on est bien sûr de trouver quelque chose à redire au fonctionnement de chacun de ses organes. Les reins, l'épaule, le genou - et si on aborde la liste des choses internes alors y a plus de bornes, comme dirait Monsieur Fenouillard. C'est l'inépuisable sujet de conversation des Tamaloù (bien que l'appellation soit déjà rudement obsolète : son air bon enfant n'est plus de mise, à présent que les autorités médicales savantes et pratiques ont envahi nos écrans de télé et que chacun s'essaie à manipuler le vocabulaire à la mode). Il n'empêche que tant que la cervelle reste en bon état on a quelque raison de se déclarer verni. J'ai l"exemple - douloureusement proche - d'un organisme pendant huit ans resté solide coeur poumons artères estomac intestin, et d'où toute trace de connaissance ou de reconnaissance s'était enfuie, plus d'émotions plus de sentiments plus de réactions plus de pensée. On peut supposer que le légume ne se rend compte de rien , mais quel désespoir pour les proches! J'y pense sans cesse, et c'est une chance que pour mon entourage je compte encore toutes mes billes, comme on dit en Ohio, même si le fait d'être devenue sourde comme un pot ne facilite pas les conversations ni la transmission des messages...
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