J’ai toujours beaucoup d’intérêt et d’émotion à suivre les progrès que fait un chat pour s’intégrer définitivement aux rythmes et à la vie de ma maisonnée, puisque nous vivons en symbiose – c’est un pléonasme, mais il sonne bien et il est sympathique – et qu’il s’agit pour lui de dépasser l’instinct de survie en s’adaptant à des compagnies pas toujours bienveillantes au premier abord. Je viens d’en faire l’expérience – ô combien agréable et stimulante - avec Maxence qui en une quinzaine de jours a fait des progrès foudroyants. Il n’y a guère que deux semaines en effet – mettons trois ^pour faire le bon poids honnête - qu’il est apparu sur mon orbite, autrement dit dans les parages de mon jardin, me fixant depuis la route avec intensité. Me chassera ? Me chassera pas ? Dès l’abord il semblait à peu près rassuré, tout de même : je dois avoir soit une bonne réputation parmi la gent féline du quartier, soit une bonne tête, en tout cas je ne fais pas peur aux chats, même de loin. Une première observation, oreilles dressées, thorax avantageux – aux aguets. Une première avancée, pâtée dévorée sur mon palier après une progression circonspecte. Puis connaissance faite avec de petites bribes de bifteck haché, nouveauté dans son régime : à déguster si l’on vient jusqu’à proximité de mes pieds. Chose faire, mi-forfanterie, mi-étonnement. Au bout de deux jours je peux caresser. Au bout de trois jours il se frotte contre mes jambes, il me suit à la cuisine. Cinq jours, il se laisse prendre dans les bras – progrès surprenant. Puis le ronron s’accentue, puis il « commence à y croire » - ce qui se traduit par l’envie de chasser tous les résidents pour affirmer son identité. Peu à peu la coexistence s’installe, les allées et venues séparées s’organisent en attendant un rassemblement qui sera la preuve définitive de l’intégration, décidée par l’un et acceptée par les autres (c’est sur ce point-là qu’il faut marcher sur des œufs, mais à chaque nouvelle naturalisation de SDF sans papiers je sais comment faire). Je passe sur les détails mineurs de la progresseion : cette nuit Maxence a dormi contre mon épaule.