Mères angoissées ! Mères dévorées par l’amour de votre progéniture et tourmentées par le souci de son avenir ! Comme l’on peut comprendre vos tracas, vos terreurs, vos désolations ! Bien entendu, quand on songe à toutes ces études ne débouchant sur rien ou pas grand-chose, à tous ces diplômes n’ayant aucune valeur marchande, à toutes ces concurrences déloyales, à ces arrangements népotistes, à ces élections de nouvel employé haut de gamme dont le résultat est connu d’un petit cercle avant même que le concours et son règlement n’aient été annoncés et publiés, quand on songe à ces recrutements falsifiés qui vont laisser sur le sable votre fifils si vous n’avez personne dans votre manche…bien sûr, bien sûr, c’est souvent comme cela que ça se passe, et si vos adolescents boutonneux en arrivent à peu près au choix d’une carrière, d’une voie, d’un embranchement ( avenue ou impasse, comment savoir ?), vous pouvez fort bien, toutes jeunettes encore et super bien conservées grâce à la vigilance de votre esthéticienne, vous découvrir un beau jour vos premiers cheveux blancs. Mais selon les soucis les plus lancinants des mammas d’Outre-Atlantique, d’après ce qu’on m’a dit, c’est sur un autre terrain que se développe l’angoisse maternelle. La grande question qui se pose, qui s’impose, c’est : « Votre fils est-il gay ? ». C’est bien plus ravageant que la question d’il y a une cinquantaine d’années : « Devine qui vient dîner ? », alors que votre fifille vous réservait de rencontrer un futur gendre noir. Tassé, tout ça ! La grande question, à présent, c’est celle à laquelle votre fifils ne voudra pas répondre, il faudra donc que vous enquêtiez toute seule. Mais ne vous désolez pas : il existe déjà aux USA dans les magazines féminins des listes de questions dont les réponses vous fixeront. En vingt questions, avec les réponses que vous saurez donner, vous serez renseignée. Maintenant, ne me demandez pas quel sens prendront ces questions : il y a déjà belle lurette que j’ai dépassé l’âge d’enquêter en douce sur les tendances secrètes d’adolescents boutonneux – à supposer même que la chose m’ait jamais intéressée…
