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21 juillet 2012 6 21 /07 /juillet /2012 12:00

            Dans cette longue coulée de récit qui devra, nous dit Proust, attendre les dernières années pour acquérir sa forme définitive – le choix du temps passé comme sujet essentiel de la construction romanesque – les anecdotes sont rares, remplacées qu’elles sont le plus souvent par les conversations ou les considérations du narrateur sur l’étrange faune de son biotope. Ainsi un dîner chez Mme Verdurin ne prend pas son relief de ce qui y est dit, mais offre un ensemble de petits détails où chaque individu, comme par exemple le faux génie de la médecine qui répare si bien les mâchoires déboîtées, reçoit au passage un coup de projecteur révélant surtout sa médiocrité. Dans une autre tonalité, une soirée de musique chez les Guermantes sera elle aussi vide, superficielle, sans ossature dramatique – mise à part la contribution du pianiste ou de la harpiste qu’on déguste avec une flûte à champagne à la main et en chuchotant les derniers commérages. Confirmant ce que j’ai dit du premier volume, les anecdotes y abondent (telles l’erreur de Swann rongé de jalousie se trompant de demeure pour aller faire du tapage nocturne), menues mais présentes, avant de se fondre dans un tableau d’ensemble d’où plus grand-chose ne saillira. Assez marquant toutefois pour que deux réalisateurs s’en soient emparés, l’épisode des souliers rouges. Mme de Guermantes, déjà en retard pour une sortie nocturne, porte une somptueuse robe rouge et descend un escalier en laissant voir des souliers noirs. C’est le duc son époux qui se récrie, relevant la faute de goût, assurant qu’avant d’être à destination Oriane déplorera son étourderie et le renverra, lui, l’époux dévoué, à la recherche de chaussures assorties… D’où le branle-bas de combat : camériste, valet de pied , tout le monde s’y met, la duchesse se voit chaussée correctement, un peu embarrassée d’avoir commis cet impair devant le narrateur, mais son rang lui permet d’arriver en retard.. . Que la scène ait été retenue par deux fois – Schlöndorff et, je crois, Ruiz – est quand même significatif, outre  que, filmée, elle fournissait la matière d’un superbe morceau de bravoure. J’espère, mes belins-belines, que vous sentez bien la différence de ton et d’objectif entre cet épisode et, par exemple, la visite, groupée ou égrenée, que reçoit le peintre Elstir dans son atelier où les jeunes filles en fleur viennent le saluer au passage,  en simple petit tableau de genre..

...Et Schlöndorff prend deux ff, bégaiement pas toujours respecté, malheureusement...

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