Je cherche toujours à deviner, sinon à vraiment comprendre, ce qui dans les bases de nos mécanismes de spectateurs nous distingue des Britanniques (cette longue série d’articles à caractère parfaitement encyclopédique sur leur comique et leurs sitcoms m’y autorise, mes belins-belines : cela veut tout de même dire qu’au niveau de la presse nationale gauloise on s’intéresse aussi aux programmes et tendances de la télé anglaise, et qu’il ne s’agit pas seulement d’une fantaisie, ou pourquoi pas d’une obsession, de ma part). J’ai été frappée hier, précisément au milieu d’une méditation en profondeur sur le sujet, par le fait que de ce côté-ci du Channel on centre volontiers les épisodes autour d’un personnage mâle ou femelle qui va servir d’ossature à toute la série. Ici c’est un médecin humaniste, là une préfète (oh que c’est beau, ces revers brodés d’argent !), là encore une lieutenante ou une capitaine de police, et ainsi de suite : on les retrouve chaque semaine à leur horaire annoncé, on repart chaque fois sur une nouvelle intrigue ou un nouveau problème, mais les malheureux sont toujours les mêmes, avec toujours les mêmes réactions ; on les a choisis à cause de leur physique (Jérôme Anger, Anny Duperrey, Corinne Touzet) donc de leur capacité à incarner la fonction dans laquelle on les engonce, il n’y a ainsi aucun danger qu’on les voie évoluer d’une semaine à l’autre et c’est bien dommage. Côté BBC, c’est tout un noyau social qui sert de sujet, bourgeois citadin contre villageois, boutique ouverte à toute heure, grand magasin et ses employés, familles déjantées.. ; Un exemple : le fils, visage tout barbouillé de terre, traverse la cuisine avec une pelle sur l’épaule. « Que fais-tu avec cette pelle ? dit la mère. – Je creuse vos tombes », dit le fils du tac au tac. Je ne vois pas ça installé dans une comédie sur la famille de ce côté-ci de la Manche.
