19 décembre 2009
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Ce serait bien tout de même si le temps pouvait s'arrêter. On ne sait pas trop ce qui pourrait se
passer, puisque tout serait figé dans son état à la minute même de l'arrêt, les gestes en cours, les discours en train, les divers processus physiologiques en marche (accouchements, digestions,
interventions chirurgicales, j'en passe et de belles). Mais peut-être qu'on connaîtrait un certain soulagement à ne plus se sentir l'épée aux reins pour terminer un boulot dans les délais
prescrits. Le stress, qu'ils disent tous maintenant, et c'est bien vrai qu'il cause des ravages à tous les niveaux (sauf peut-être chez nos dirigeants, qui ont tellement sous-traité leurs tâches et
délégué leurs fonctions qu'il ne leur reste plus qu'à aller se promener pour représenter la France dans les banquets - d'après ce que je viens d'apprendre, certains de ces dîners sont bien
écourtés, pas même le temps de se resservir de dessert, quant au café on s'en passe, on n'a pas besoin d'excitants annexes, c'est vous dire que la représentation de la France dans divers banquets
n'est pas de tout repos, ça finirait même par vous fatiguer le bonhomme). Je vous parle de ce problème du temps parce que je viens justement d'en sortir : je me suis délicatement retiré l'épée du
dos - en tâchant de ne pas léser le nerf sciatique : c'est un chatouilloux celui-là, et mauvais caractère en plus - et l'ai posée à côté de moi. Pas vraiment un bel objet à contempler,
d'ailleurs pour trouver beau un objet dont la fonction est de tuer il faut avoir l'estomac mieux accroché que n'est le mien. Voilà donc que pour quelque temps du moins je n'ai plus cette menace
douloureuse par derrière moi : si vous avez quelque finesse vous en conclurez que je viens de terminer un bouquin, eh!bien bingo, mes belins-belines! Je vais donc pouvoir m'extraire du
XVIIIème siècle puisque ma Colombe était une manante de l'Ancien Régime. Non qu'il me pèse, ce XVIIIème! Que non pas! C'est alors qu'on écrivait le mieux... Et puis, toutes ces idées qui
commençaient à se mettre en branle, après des siècles d'immobilité pratiquement garantie, ça créait des vibrations intéressantes - congenial vibes, comme on dirait aux USA où les atmosphères
comptent avant tout. Mais il est bon de se secouer un peu : après la dernière page des "Noeuds d'Argile" je m'étais replongée dans mon XXème ultra-contemporain (les 48 heures où se déroulait
"Clair de Nuit" étaient datées : 13-15 août 1983), avant de retourner dans le passé toujours fascinant, de nouveau le XIXème, puis le XXème pour terminer la trilogie des "Mains
nues", avant de retrouver le milieu du XIXème pour "Les Mains libres", Luxembourg et Amériques. Finalement, dès que le stress ou ses causes s'écartent loin de moi, comme en ce moment, ça n'est pas
si mal de laisser faire le temps : en ce moment, ça me permet d'écrire à Kouchner à chaque instant, à Nicolas aussi (on lui glisse mon courrier entre deux avions), je leur dis ce que je pense d'eux
au fur et à mesure qu'ils ne font rien, ils doivent se lasser, ils ne me répondent plus. A lundi!